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Yoga de la Femme 29/01/2012

Le yoga au féminin
Les étapes de la vie d'une femme


« A chaque entrée dans un nouvel âge de la vie se déclenche plus ou moins fortement une crise. Il ne s'agit pas d'une crise pathologique mais d'une crise existentielle normale à éprouver, urgente à vivre, qui correspond à un processus d'évolution fondamental ». Catherine Bergeret-Amselek

 

J'anime depuis plusieurs années des week-ends de « yoga au féminin » et j'ai choisi cette année d'en animer un avec une amie acupunctrice qui s'intéresse de très près à la femme. Durant ces week-ends, j'ai des femmes de tous les âges, un dialogue s'instaure et je leur parle de mon expérience de yoga dans tous ces moments importants de ma vie de femme : au moment des règles, pendant et après une grossesse, au moment de la ménopause, après la ménopause.

 

J'enseigne le yoga depuis plus de 25 ans et je le pratique au quotidien. Le yoga m'a permis de traverser les moments forts tels que la grossesse, l'accouchement, la ménopause de la façon la plus naturelle possible en évitant toutes les hormones qui accompagnent tant de femmes dans leur quotidien. Je parle aussi de toutes les questions liées à l'adolescence dans des cours spécifiques aux adolescents et j'accompagne en individuel des femmes enceintes qui continuent souvent le yoga après l'accouchement. Depuis quelques années de plus en plus de femmes viennent me voir pour des problèmes d'incontinence. J'ai mis des ateliers en place pour ces problèmes spécifiques qui peuvent arriver très tôt et qui sont le plus souvent médicalisés ou pris à la légère. Pour introduire le sujet, je vous livre un article que j'ai écrit l'an dernier pour démarrer mon stage « le yoga au féminin » et tout le stage a pris la couleur de cet article.

 

Dans notre monde occidental nous voyons de plus en plus le vieillissement comme une dégradation, comme nous refusons cette idée, nous comptons sur la médecine pour nous éviter de trop vieillir, de trop souffrir et il nous faut passer par différentes étapes. Cela commence dès 14 ans avec la pilule pour les problèmes de règles qui font souffrir, cette pilule et ses hormones se prolongeant ensuite de nombreuses années comme contraceptif. Puis quand la femme veut avoir un enfant et que ça ne marche pas tout de suite, on envisage très vite la FIV car c'est une trop grande souffrance de ne pas avoir d'enfants. Quand elle est enceinte, elle est bien suivie médicalement, elle passe d'une échographie à une autre et s'il le faut on n'hésite pas à l'arrêter et à lui demander de garder la maison ou le lit une bonne partie de la grossesse. Pour l'accouchement, pas d'inquiétude, on peut le déclencher par commodité, il y a la péridurale et si ça dure trop longtemps on accélère le processus. Quand la femme a son bébé, il semble normal qu'elle déprime mais elle peut toujours faire appel aux antidépresseurs qui seront là dès qu'elle se sentira fragile.

 

Puis vient le moment de la ménopause. La femme qui a pris la pilule une grande partie de sa vie pour ne pas avoir d'enfants, ne supporte pas l'idée de l'arrêt de ses règles. Elle va donc forcément déprimer. Viennent les bouffées de chaleur, son périnée va s'effondrer, elle va prendre 10 kilos, va avoir une sécheresse vaginale et son mari va la quitter. Sans compter l'ostéoporose qui se profile, les fibromes de l'utérus, le cancer du sein, les problèmes de thyroïde qui vont mettre la femme de mauvaise humeur toute la journée etc. Pour éviter cela, la médecine va venir à son secours et va lui donner de nouvelles hormones qui vont supprimer les symptômes et retarder le vieillissement. Pour le périnée, il n'y a pas grand-chose à faire, un peu de
rééducation et si ça ne marche pas, il y a des protections assez discrètes. Pour les fibromes, mieux vaut enlever l'utérus car après tout à cet âge-là la femme n'en a plus besoin. Même chose pour les seins. Quant à la thyroïde, on peut s'en passer, il y a des médicaments que l'on peut prendre à vie. Pour l'ostéoporose, on invite la femme à prendre du calcium, beaucoup de produits laitiers, du fromage, bref tout ce qui
peut créer des allergies et faire grossir, (mais ça on ne le dit pas) et si la femme le vit mal, c'est qu'elle mange trop, elle n'a qu'à suivre un régime et faire du sport. Quant à la sécheresse vaginale, on peut toujours mettre de la vaseline.

 

Et voilà la femme réduite à une série de problèmes et de solutions. Il y a de quoi s'inquiéter d'être une femme et moi personnellement je ne le souhaite à personne.

Alors que faire, doit-on tout accepter et se résigner ? Doit-on tout refuser et voir ce que la vie nous réserve ? Il n'y a pas à choisir entre une voie ou l'autre, une troisième
voie se présente qui est celle de poser un nouveau regard sur les étapes qui nous sont données à vivre, je dis bien qui nous sont données car c'est une chance d'être une femme, c'est une chance d'avoir autant d'occasions de s'interroger et cela très jeune. Les hommes ont aussi leurs problèmes et pour certains ça se pose très tôt. Mais pour la majorité d'entre eux, ils sont traversés par la vie sans réelle prise de conscience et tant que ça marche, tant que le corps tient, ils continuent à vivre
sans trop se poser de questions. Pour nous, les questions se posent très jeunes, comme on l'a vu plus haut, et elles seront ravivées à chaque événement nouveau que la femme aura à vivre. Vieillir est pour moi accumuler des expériences, franchir des étapes, grandir en « sagesse », en sérénité, travailler sur ses peurs, se libérer de ses angoisses. C'est tout un programme beaucoup plus réjouissant. Il y a longtemps que je m'interroge sur le vieillissement, je me suis sentie vieillir très jeune, et je ne me résignais pas à l'idée que ce serait de pire en pire et c'est peut-être cette prise de conscience précoce qui m'a amenée à chercher en moi de nouvelles ressources. Ce qui m'a surtout aidée et ce qui m'aide au quotidien, c'est ma pratique du yoga. Je sens chaque jour dans mon corps des capacités nouvelles que je n'ai pas encore explorées et je me dis que je n'en aurai jamais fini.

 

Alors, je peux donc éviter le vieillissement ?

 

Je me dois surtout de ne pas lâcher mon corps, de continuer à l'éveiller ainsi que mon esprit. Vieillir n'est pas du futur mais  du  moment présent. Je serai demain ce que je suis  aujourd'hui. Alors  pourquoi me préoccuper de demain ? La dynamique   de   l'instant  présent m'invite chaque jour à « travailler » sur  tout  ce  qui   encombre  ma mémoire,   sur   ce   qui   m'a   été transmis. Il me faut changer le cours des choses et pour cela, il me faut accueillir sans jugement tout ce qui se présente à moi. Annick de Souzenelle nous dit que la souffrance n'est pas ontologique, seule l'épreuve l'est. Il me faut donc transformer la souffrance en une épreuve à vivre et là ça change tout. Je ne me sens plus victime de ce qui m'arrive mais acteur d'une dynamique nouvelle, d'un retournement, d'une nouvelle naissance. Le bébé avant de naître doit se retourner et accepter de plonger la tête la première. Je dois me retourner continuellement et accepter de plonger la tête la première en toute confiance et si le danger est trop grand, je peux attendre et ne pas me laisser prendre par mes peurs du moment. L'accouchement qui est une étape si importante dans la vie d'une femme nous fait toucher de près à tout ce qu'il nous faut déployer pour accoucher de nous-mêmes. Et on voudrait s'en remettre à la médecine pour éviter cette grande épreuve initiatique ?

Et c'est à chaque fois ce qui se revit dans chaque étape nouvelle. Ce qui n'a pas été travaillé nous revient en pleine figure et devient toujours plus urgent à aborder. Quand la vie n'a été que contraintes, devoirs, résignations, tout continuera comme avant. On se remet de nouvelles obligations sans arrêt, comme si c'était la seule manière d'exister et ça pèse au fond de soi. Au moment de la ménopause, c'est tout ce poids de la vie qui s'exprime dans mon corps si je n'ai pas commencé le travail de « nettoyage ». Le corps me lâche, il devient lourd, encombré de toute cette histoire, le plancher pelvien ne répond plus, le ventre devient flasque, nous avons des bouffées d'angoisse qui nous envahissent et la maladie devient notre quotidien. La ménopause n'est pas cette dégradation terrifiante, n'est-elle pas appelée le « nouveau printemps » dans la médecine chinoise ? Nous n'étions que bourgeons et les fleurs sont appelées à s'ouvrir, à s'épanouir. C'est le début d'une aire nouvelle et nous devons nous réjouir de cette période qui nous guide vers toujours plus de « spiritualité », vers toujours plus de profondeur. A chaque nouvelle étape, on se sent mourir à sa vie d'avant pour aller vers une nouvelle vie. Françoise Dolto nous parle de la mort dans ces termes, elle semblait ne plus en avoir peur à la fin de sa vie. J'ai encore du chemin à faire mais je sens que j'avance vers un peu plus de sérénité. Ce qui me fait peur c'est ce qui me faisait peur à chaque nouveau passage, c'est la peur de la nouveauté, la peur de se lancer dans le vide la tête la première sans savoir où ça me mène. Nous avons tous vécu l'étape de la mort à notre naissance, nous en avons tous une expérience mais nous l'avons oubliée. Il nous faut nous rappeler notre naissance  et continuer à faire confiance, mais en toute conscience, sans oublier le travail qui va avec.

 

Auteur Bernadette Esneault-Gastineau

 

Bernadette Esneault-Gastineau est auteur du livre « Yoga et enfantement » aux éditions Quintessence.

 

Avec l'aimable autorisation de la Revue Infos-Yoga



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